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Regniowez : les Belges doutent des Français

Article paru dans La Nouvelle Gazette, S.Po le 24 avril 2017 – l’article en pdf

Pour faire renaître son circuit frontalier de Regniowez, le Département des Ardennes a de grands projets, dont certains en synergie avec le Circuit de Chimay. Au grand dam des riverains qui craignent le bruit. Les villages chimaciens de Rièzes et L’Escaillère ainsi que Cul-des-Sarts (Couvin) seront touchés. Les autorités françaises proposent de réaliser une étude des nuisances sonores sur ces trois entités. Mais les riverains belges ne croient pas en leur bonne foi : « Ces études seront bidouillées. »

Depuis plusieurs mois, les différentes parties se chamaillent à distance, à coups de procès d’intentions ou de communications imprécises. Jeudi dernier, ils ont enfin été réunis autour d’une même table, au Parlement wallon, à l’invitation du député couvinois Eddy Fontaine. Etaient présents : une dizaine de riverains belgo-français et un représentant du Département des Ardennes, propriétaire du circuit de Regniowez.

Jean Yernaux, l’administrateur délégué du Circuit de Chimay était également de la partie car ces deux circuits ont des projets en commun, réunis sous l’appellation « 2-morrow track ».

À cette fin, ils se sont constitués en holding. Ensemble, ils ont introduit une demande de subsides d’1 million d’euros au Fonds FEDER (Programme transfrontalier Interreg) afin d’organiser plusieurs types d’événements.

La bourgmestre chimacienne, Françoise Fassiaux, et son premier échevin Tanguy Dardenne, qui a participé aux réunions préparatoires à ce projet, étaient aussi à table.

« Cette première réunion plénière a eu le mérite d’apporter une information précise sur ce projet », explique Eddy Fontaine. « Plusieurs avancées majeures en sont ressorties. Une étude de bruit sera finalement réalisée côte belge et financée par la France. En outre, un comité de pilotage sera mis en place pour analyser et veiller au respect des normes qui seront édictées sur base de cette étude des nuisances sonores. »

« Nous voulons des études wallonnes »

Les supporters du circuit de Regniowez pensaient bien avoir éteint l’incendie.

Il n’en est rien. Dany Maudoux, représentant belge au sein du comité de riverains, n’en démord pas : des micros français placés côté belge, il n’en veut pas ! « Oui, Monsieur Leroy (le représentant du Conseil départemental via sa casquette de président de la Communauté de Communes Ardennes Thiérache NDLR) s’est avancé sur une étude de bruit », explique cet habitant de L’Escaillère. « Mais nous, Belges, nous n’acceptons pas ces mêmes études qui, par le passé, lorsque le circuit était encore en activité, ont été bidouillées. Nous voulons des études wallonnes, reconnues par notre législation, et pas françaises. »

Pourquoi tant de méfiance ? Jean Yernaux évoque les excès du passé. Le Département est propriétaire du circuit depuis 25 ans et l’a, jusqu’ici, loué à des privés. Entre 2013 et 2015, des courses de « DRIFT » (pour des voitures « sur-vitaminées », genre « Fast and Furious ») ou encore des essais de dragsters y étaient organisés. Pour Jean Yernaux, ce dernier locataire du circuit aurait laissé de très mauvais souvenirs dans les mémoires riveraines.

« Ce n’est pas le problème du jour », dément Dany Maudoux. « Il y a tout simplement rupture de confiance avec les autorités françaises. Jusqu’ici, on nous a baladés. On veut nous embrouiller. »

Jean Yernaux tente de calmer le jeu, tout en défendant le circuit français : « Il fait à peine deux kilomètres et demi et est homologué pour des courses de maximum dix voitures qui ne dépasseront pas les 200 km/h. Et on parle ici de 5 compétitions par an. En autre temps, il ne sera utilisé que pour tester des véhicules. »

D’accord, mais… « Cette limitation à cinq courses concerne les quatre années couvertes par ce Projet Interreg », note Dany Maudoux. « L’intention des deux circuits est de pérenniser cette collaboration. Qui nous dit que le nombre de compétitions ne va pas ensuite spectaculairement augmenter ? »

Bref, les arguments des supporters du circuit de Regniowez ne passent pas. Pour les opposants, la région va perdre sa ressource première, le calme et le silence. Et faire fuir les candidats à l’achat immobilier…